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Professeur de sociologie et d'histoire.

mardi 7 octobre 2008

God Bless Obamerica

L’identité du prochain président des États-Unis sera connue le 4 novembre prochain. Après huit années de pouvoir républicain sous la gouverne de George W. Bush, le bilan est particulièrement désastreux et les défis du successeur à la présidence sont colossaux.

D’un point de vue économique, le surendettement a fait plonger le pays en pleine crise financière et aucun plan de redressement ne pourrait avoir un impact majeur à courte échéance. En politique étrangère, les États-Unis vivent présentement leur «deuxième Viêt-Nam» en Irak depuis le printemps 2003 et ils sont incapables de sortir dignement de ce bourbier. En politique intérieure, les écarts sociaux vont grandissant. Le filet de sécurité sociale est pratiquement nul, en santé notamment, et le système d’éducation élitiste favorise la reproduction de classes sociales très inégalitaires. Enfin, les taux de criminalité atteignent des sommets.

Il ne faudrait pas non plus passer sous silence le passé esclavagiste étasunien qui ressurgit lors de chaque crise identitaire. Le racisme et les écarts socioéconomiques entre Blancs et Noirs sont toujours présents, comme l’ont démontré les répercussions de l’ouragan Katrina à l’automne 2005. Il faut aussi noter les conditions de vie lamentables de milliers d’immigrants clandestins des États frontaliers du Mexique. Enfin, la répression est souvent privilégiée à la prévention comme en témoignent les taux alarmants d’emprisonnement chez les populations noires et latino-américaines.

Cette difficile conjoncture est celle qui attend le nouveau président des États-Unis en janvier prochain. Barack Obama est sans doute mieux placé que John McCain pour personnifier le changement par rapport à la présidence Bush. Il est clair que son parti véhicule des idées plus progressistes, pluralistes et ouvertes aux réalités de notre siècle; qu’on pense à la lutte à la pauvreté ou aux politiques voulant contrer le réchauffement planétaire. Mais malgré cela, une bonne partie de la campagne se joue sur un tout autre terrain : celui de la morale chrétienne.

Le mariage entre politique et religion prend une place imposante aux États-Unis depuis le 11 septembre 2001. Aux États-Unis, un bon président est davantage qu’un bon chef ou un bon guide; il est par-dessus tout un bon chrétien et un bon père de famille. D’où cette importance démesurée accordée aux pratiques religieuses et à la vie familiale de chacun des candidats. Présentement, Barack Obama cherche à tirer à son avantage ce voyeurisme médiatique en convainquant qu’il personnifie mieux que McCain les bonnes valeurs de l’Amérique. Il bâtit notamment sa campagne électorale sur la mémoire de Martin Luther King et Robert Kennedy; sur les valeurs d’espoir et de justice que ces derniers véhiculaient. En capitalisant sur cet héritage, Obama acquiert cependant un caractère presque surhumain qui viendra inévitablement lui jouer des tours. L’Amérique ne recherche pas qu’un président, elle recherche un sauveur!

Si Obama est élu en novembre, les attentes à son égard seront si énormes qu’il ne pourra que décevoir. Comment satisfaire les ambitions hégémoniques de la plus grande puissance militaire du monde quand celle-ci croule sous les dettes? Comment s’adapter aux poussées migratoires associées à la mondialisation quand un vent néoconservateur déferle sur le pays? Comment adopter des politiques de redistribution de la richesse dans un pays qui a le communisme en aversion? Comment convaincre les gens de consommer de manière plus responsable quand surconsommation est associée à prospérité?

Il faut demeurer lucide. Les États-Unis vivent une période de crise sans précédent. Aucun homme seul, aussi charismatique et compétent puisse-t-il être, ne pourrait sortir le pays de l’impasse. Le problème de l’Amérique est viscéral et touche les fondements mêmes de sa société : son mode de vie, sa consommation, sa perception de la réussite sociale. La vision d’un Barack Obama salvateur est certainement erronée. Elle n’est qu’une illusion habilement entretenue par les progressistes américains pour vaincre McCain. Prévoyons cependant un retour difficile à la réalité au lendemain des élections.

Publié au Nouvelliste le 9 octobre 2008

http://www.cyberpresse.ca/le-nouvelliste/opinions/200810/09/01-28109-god-bless-obamerica.php

Publié à La Presse le 14 octobre 2008

http://www.cyberpresse.ca/opinions/forums/200810/14/01-29179-god-bless-obamerica.php

samedi 20 septembre 2008

La culture sous Harper

Un système électoral gravement malade!

Le 14 octobre prochain, les citoyens canadiens se déplaceront aux urnes pour une élection fédérale pour une troisième fois depuis 2004. À ce moment-ci de la campagne, rien ne laisse présager un scénario autre que la réélection du gouvernement conservateur de Stephen Harper. Minoritaire? Majoritaire? Les paris sont lancés.

Cette campagne s’annonce sans aucune surprise de taille, sans réel bouleversement. Pourquoi? Parce que derrière des apparences trompeuses d’ouverture aux courants d’idées minoritaires (en raison d’un pluralisme des idées apparent, durant les débats des chefs notamment), le système électoral canadien ne permet d’aucune manière l’accès au pouvoir à un tiers parti. Jack Layton peut bien scander haut et fort qu’il veut être «notre prochain premier ministre», ses espoirs réels sont beaucoup plus modestes qu’il n’y paraît. Comme à chacune des élections fédérales depuis 1867, la véritable course se fait à deux.

Dans le coin droit, le gouvernement sortant. Un gouvernement conservateur qui, en plus de demeurer complètement insensible aux enjeux culturels et environnementaux, se ferme au monde extra-américain en matière économique. Ses priorités témoignent d’une vision du siècle dernier : exploitation pétrolière, interventionnisme militaire, renforcement de la répression et de la sécurité.

Dans l’autre coin droit, le Parti libéral qui se donne des airs progressistes (facile à faire dans le contexte actuel). Dans une campagne reposant principalement sur l’image, le manque de charisme de Stéphane Dion s’avère préoccupant, voire problématique, pour le Parti libéral. Toutefois, la désorganisation de ce parti, depuis que Dion est en poste s’avère plus troublant encore. Ce dernier cache mal son manque de vision derrière son plan vert. La déconfiture de son parti au Québec (depuis le scandale des commandites) le fait très mal paraître. C’est sans compter qu’il peut difficilement cacher les ambitions de ses collègues (les Ignatieff, Rae et Coderre) qui le regardent s’engouffrer tels des charognards regardant agoniser leur prochain repas.

Pourquoi une autre option n’est-elle pas possible aux Canadiens? En raison du déficit démocratique inhérent au mode de scrutin actuel! Aucune proportionnalité n’étant admise dans le système, les Canadiens votant selon leurs convictions idéologiques profondes seront pénalisées : le vote de plus de la moitié des électeurs ne sera donc pas pris en considération. Le vote stratégique, pragmatique – utile disent certains – sera récompensé. Ainsi, un supporter du Bloc québécois dans Outremont voterait pour Thomas Mulcair du Nouveau parti démocratique (NPD) s’il veut être stratégique; et parallèlement, un supporter du NPD dans Trois-Rivières voterait pour Paule Brunelle du Bloc québécois. Tout cela dans le but de freiner les Conservateurs et de les restreindre à leur statut de minoritaire.

D’être conscient de cette lacune du mode de scrutin est une chose, mais quand des citoyens mettent en branle le troc de votes par Internet (voir le site Pair Vote ou Troc de votes sur Facebook), voilà le véritable signe que le système électoral est malade. Déresponsabilisation de l’État oblige, les citoyens en sont-ils rendus à devoir transformer eux-mêmes, da manière artisanale, le mode de scrutin? L’adaptation d’une forme de scrutin datant de 1867 à la réalité du XXIe siècle est-elle si compliquée à faire? La réponse est non! Ce n’est qu’une question de volonté politique, cette même volonté qui manque de manière aussi flagrante au Québec, où le mode de scrutin est identiquement déficitaire. N’est-il pas temps de s’éveiller et de comprendre pourquoi règne tout ce cynisme ambiant dans le monde politique? Voici peut-être un élément de réponse.

Publié au Nouvelliste le 23 septembre 2008
http://www.cyberpresse.ca/le-nouvelliste/tribune-des-lecteurs/200809/23/01-22787-un-systeme-electoral-tres-malade.php

samedi 26 avril 2008

Une pétrodépendance qui tire à sa faim?

Depuis quelques mois, les pages des cahiers économiques des journaux regorgent de nouvelles pessimistes. Le vocabulaire utilisé par les analystes économiques ressemble à : récession, inflation, diminution de la croissance, pertes et ainsi de suite. En effet, les États-Unis sont menacés de récession et, par ricochet, nous le sommes. Cependant, au-delà des scénarios conjoncturels qui prévoient un ralentissement temporaire, il faut user de clairvoyance et entrevoir la réelle menace structurelle. Cette menace est celle d’une crise économique majeure qui serait rien de moins qu’une crise de légitimité du système capitaliste dans sa forme actuelle (financière).

Au devant de ces scénarios de crise que d’aucuns considèrent comme apocalyptiques se profile le symbole même de la surexploitation de notre planète : le pétrole. Depuis déjà quelques décennies, la planète dévoile ses limites, sa fragilité, voire sa vulnérabilité. La flambée des prix du pétrole et la pénurie prévue de cette ressource (à partir de 2040 selon les scénarios les plus réalistes) sont les symptômes les plus clairs de cette surexploitation des richesses de la Terre. Claude Picher écrivait dernièrement (La Presse, 26 avril) que l’ensemble des importations du Québec en pétrole brut avait subi une hausse de prix de 457% ces dix dernières années! Pourtant, on le sait, toute l’économie mondiale – et forcément québécoise – dépend de cette ressource. Dans cet ère de globalisation des marchés, les moyens de transport alimentés au pétrole ont une importance accrue, voire démesurée. Tout produit de consommation voyage des milliers de kilomètres avant d’être acheté. L’exemple le plus probant est celui des aliments qui, avant d’aboutir dans notre assiette, voyagent en moyenne entre 2600 et 4000 kilomètres.

Effectivement, cette hausse vertigineuse du prix du pétrole, accompagnée de la crise hypothécaire étasunienne, risque de faire chuter le monde capitaliste en pleine crise. Crise économique d’abord, mais humanitaire surtout. Déjà, la planète vit une crise alimentaire alarmante. Le prix de certains aliments connaît une croissance exponentielle. C’est le cas du prix du blé qui a crû de 181% en trois ans. Il y a quelques jours, le président de la Banque mondiale Robert Zoellick déclarait que le doublement des prix alimentaires ces trois dernières années risquait de plonger quelque cent millions de nouveaux individus dans la pauvreté. Comme résultat direct, trente-trois États dans le monde sont menacés de troubles politiques et de désordres sociaux liés directement à la pénurie d’aliments essentiels à la survie. C’est déjà le cas dans quelques-uns des pays les plus durement touchés dont Haïti, le Cameroun et la Côte d’Ivoire.

Pourtant, en 2000 étaient divulgués à l’Organisation des Nations Unies (ONU) les Objectifs du Millénaire qui visaient entre autres à réduire pour 2015 de moitié l’extrême-pauvreté dans le monde (le milliard de personnes vivant avec moins d’un dollar par jour). À mi-chemin de l’échéancier, nous pouvons déjà faire le constat que cet objectif se destine à un échec cuisant, un échec pour toute l’humanité. Faut-il une crise humanitaire pour remettre en question les fondements de l’ordre (ou du désordre) économique actuel? Faut-il une crise humanitaire pour enfin percevoir le fossé qui s’élargit entre les mieux nantis et les plus défavorisés? Faut-il absolument une crise humanitaire pour que nous changions notre mode de vie et nos habitudes de consommation? Les prochaines années répondront à ces questions.

Publié au Nouvelliste le 29 avril 2008
Publié au Devoir le 30 avril 2008
http://www.ledevoir.com/2008/04/30/187551.html

samedi 12 avril 2008

Zeitgeist the movie

http://www.zeitgeistmovie.com/main.htm

Interesting documentary film on different conspiracy theories.
Part 1 : The Greatest Story Ever Told (Christianity)
Part 2 : All the World's A Stage (the attacks of 9/11)
Part 3 : Don't Mind the Men Behind the Curtain (Federal Reserve Bank)

Good, but as any conspiracy theory, need to stay objective toward it and to keep in mind it's often just an interpretation of the reality (as anything shall I say).

dimanche 9 mars 2008

Quand militarisme et éducation s'entremêlent

(Texte écrit à la suite de parution de publicités de l'armée canadienne dans un journal de mon Collège)

Dans la seconde moitié du XXe siècle, le Canada était perçu comme un pays pacifique et un pays neutre. Les missions de ses militaires étaient réservées exclusivement à des fins pacifiques. Vivons-nous une modification de la situation depuis que les militaires canadiens sont en Afghanistan? Se pourrait-il qu’au-delà des grands idéaux clamés par notre gouvernement conservateur, ce soit des motivations stratégiques économico-géopolitiques qui poussent une partie des États occidentaux à aller s’investir (et investir surtout des vies humaines) en Afghanistan? Ces questions doivent demeurer au cœur de l’actualité. Elles doivent être débattues dans les médias ainsi que dans tous les milieux éducatifs visant à former les citoyens de demain.

Oui! L’école est un lieu pour discuter, débattre, argumenter. Ce n’est pas un lieu pour recruter. Aussi militariste puisse être notre gouvernement, il est tout à fait inacceptable que l’armée canadienne vienne faire sa propagande dans nos écoles (collèges et universités). L’armée a ses collèges militaires. Si elle veut faire la promotion de ses programmes, c’est une chose. Mais vendre l’armée, vendre l’enrôlement, vendre la guerre, c’est à mes yeux criminel.

Le Collège Laflèche, en tant qu’institution qui forme des citoyens, en tant qu’institution socialement responsable, devrait refuser que l’armée canadienne vienne faire sa propagande dans son établissement (sous forme de publicité insidieuse entre autres). Il est du devoir de cette institution d’informer des enjeux de cette guerre. Mais refusons-nous à nous laisser réduire à cette logique marchande qui fait de l’étudiant lui-même un potentiel marchand… dans ce cas, une potentielle chair à canon.

vendredi 29 février 2008

Et si le débat était relancé

Cette semaine, des étudiants du Collège où j'enseigne ont voulu remettre le débat de la souveraineté du Québec au coeur des préoccupations étudiantes. Ils ont demandé aux professeurs leur collaboration en leur demandant d'écrire un court texte exprimant leur opinion. Voici le mien.


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J’applaudis l’initiative d’étudiants du Collège de vouloir remettre la question nationale au cœur des préoccupations des Québécois, principalement des jeunes. Néanmoins, question de ne pas reproduire ses erreurs du passé, le mouvement souverainiste québécois devrait amorcer sa réflexion en se questionnant sur les raisons pour lesquelles le débat a autant perdu en ampleur ces dernières années.

Les derniers sondages démontrent que c’est maintenant plus de 60% des Québécois qui n’appuient plus l’option souverainiste (63% selon un sondage de Léger Marketing datant de mai 2007). Pourquoi? Est-ce que l’option a mal vieilli? Est-ce que le Parti québécois est maintenant incapable de porter le projet en raison de toutes ses divisions? Est-ce simplement le contexte qui ne s’y prête pas? Difficile à dire. Toutefois, plus que jamais dans l’histoire du Québec, je crois qu’il est essentiel de débattre et de remettre le sujet à l’actualité.

Que l’on soit souverainiste ou fédéraliste, de gauche comme de droite, le contexte de globalisation prête au questionnement sur l’avenir des cultures et des langues en position minoritaire, incluant bien sûr le Québec. Loin de moi l’intention de dire qu’il faille se victimiser face à l’Amérique anglaise. Au contraire, le Québec de demain, qu’il soit souverain ou au sein de la fédération canadienne, se devra d’être plus ouvert que jamais. À la manière de la langue finnoise en Finlande ou danoise au Danemark, les Québécois francophones pourraient très bien faire la promotion du vivre-ensemble en français, tout en améliorant leur maîtrise de l’anglais, voire de l’espagnol. Il est en effet inadmissible que les Québécois ne maîtrisent pas davantage l’anglais. Cependant, il ne faut pas oublier que toute l’identité de cette nation québécoise repose sur l’héritage de notre langue. C’est elle qui nous a façonnés et c’est grâce à elle que nous parlons de nous comme d’une société distincte par rapport au Canada anglais ou aux États-Unis.

Il presse de remettre la question nationale au cœur de l’actualité, ne serait-ce qu’afin de s’assurer qu’autant nos enfants que ceux des immigrants qui choisiront un jour le Québec puissent s’exprimer en français et ainsi perpétuer l’héritage si riche de notre nation. La souveraineté est-elle encore le projet de société qu’il faille privilégier pour arriver à cette fin? Peut-être, mais non sans qu’il soit actualisé. Le débat reste ouvert. Ne le fermons pas.



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Par ailleurs, je renvoie à un texte que j'ai écrit il y a près de 3 ans, quand j'étais en Alberta, en réaction à une question qu'un collègue m'avait posé.

http://dland80.blogspot.com/2005/07/is-future-of-canada-secure.html