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Professeur de sociologie et d'histoire.

dimanche 16 septembre 2007

Six ans de guerre au terrorisme

Il y a quelques jours à peine était souligné le sixième anniversaire des attentats du 11 septembre 2001. De ces attaques du World Trade Center et du Pentagone, vous pouvez retenir le nombre de morts ou encore le caractère spectaculaire. Toutefois, d’une perspective historique, nine eleven représente beaucoup plus qu’un spectacle morbide. Il est un fait de civilisation, c’est-à-dire un tournant historique annonçant de sévères bouleversements idéologiques.

En effet, aujourd’hui, en raison du traumatisme causé d’une part par la médiatisation abusive de l’événement (surinformation et désinformation) et d’autre part par les politiques xénophobes des républicains au pouvoir aux États-Unis, la façon de concevoir la différence – de s’en méfier – s’est trouvée complètement transformée. Autrement dit, en Occident, c’est tout le rapport à l’autre qui est devenu symptomatique de ces quelques heures de tourmente (dans les questions d’immigration, de multiculturalisme, de relations internationales ou simplement dans les questions de sécurité).

Sur la scène internationale, on le sait, deux importantes guerres ont été déclenchées par nos voisins du sud selon ces principes ethnocentriques. Au lendemain du 11 septembre, les tenants de l’idéologie néo-conservatrice ont mis sur pied la fameuse Global War on Terror (GWOT). Selon cette approche géopolitique, le meilleur moyen de lutter contre le terrorisme islamiste est de se lancer à son assaut. Comment? À l’aide de guerres dites préventives. C’est ainsi qu’ont eu lieu les épisodes afghan d’octobre 2001 et irakien de mars 2003. Épisodes toujours en cours, dois-je le préciser.

Officiellement, au départ, la guerre en Afghanistan avait pour missions de chasser les talibans du pouvoir et de capturer le chef d’Al-Qaïda Oussama Ben Laden. Et Pourtant! Aujourd’hui, les talibans continuent d’exercer un puissant contrôle – sinon politique, à tout le moins idéologique – au sud de l’Afghanistan (parlez-en à nos soldats canadiens sur place). Le barbu le plus célèbre du monde, quant à lui, semble aussi bien caché que le monstre du Loch Ness.

Pour nous, Canadiens, l’Afghanistan était l’occasion de participer à un effort de «démocratisation». Soyons lucides quelques instants! C’est le mouvement anti-guerre du début de l’année 2003 qui a poussé le gouvernement Chrétien de l’époque à refuser de s’investir en Irak. À ce moment, suivre les États-Unis dans leur action unilatérale aurait symbolisé rien de moins qu’un suicide politique pour bon nombre de gouvernements à travers le monde, dont le gouvernement libéral canadien. Victoire du mouvement pacifiste me direz-vous? Partielle seulement. Par ricochet, c’est ce même refus canadien de s’impliquer en Irak qui a mené nos soldats à jouer un rôle aussi stratégique en Afghanistan. D’où leur présence dans la région de Kandahar, soit la zone de loin la plus dangereuse du pays.

Six ans après le 11 septembre 2001, il ne fait aucun doute que la lutte mondiale au terrorisme s’avère être un échec sur toute la ligne! Les politiques militaristes des États-Unis et de leurs alliés n’ont mené à rien de moins qu’une exacerbation des tensions interethniques à travers le monde entier. La démocratie dans tout ça? Elle progresse, me direz-vous. En réalité, je ne connais aucun pays d’où la démocratie a germé des suites d’une invasion étrangère.

Aussi dévoués puissent être nos soldats canadiens, leur mission est vouée à un échec tant et aussi longtemps que la présumée «stabilisation» du pays sera priorisée au détriment du développement d’infrastructures scolaires ou communautaires. La coopération internationale présuppose que l’action étrangère ne vient qu’en appui aux initiatives locales. Ainsi, quitte à délaisser temporairement les régions trop hostiles, il est nécessaire de revoir l’entièreté des objectifs de notre présence au Moyen-Orient. La mission canadienne est vouée à un échec tant et aussi longtemps que les Afghans percevront nos soldats comme des envahisseurs.


Publié au Nouvelliste le 18 septembre 2007 sous le titre Un échec sur toute la ligne.

jeudi 13 septembre 2007

Un choc culturel en Amazonie


Este verano, fui en Perú para vivir un grande experiencia cultural. Empecé a aprender un poco de español. Ahora, voy a de repente preparar un otro viaje por el año proximo en Argentina. Voy a ver mas tarde, pero es el tiempo de continuar a mejorar mi tercera idioma.

Entretanto, aquí es un texto que he escrito cuando yo estaba en Iquitos en Junio.




Un choc culturel en Amazonie

En compagnie de dix autres Québécois (dont sept étudiants du Collège Laflèche) je réside depuis quatre semaines dans la ville d’Iquitos au Pérou, en plein cœur de l’Amazonie. À 27 ans, je vis mon premier véritable choc culturel.

Le vendredi 25 mai dernier, nous descendions de l’avion qui nous avait menés au milieu de la forêt amazonienne. Quelques heures plus tôt, nous attendions (entre deux vols) dans un des centres mondiaux de la surconsommation (Miami Beach) et maintenant, nous étions à…Iquitos.

Aéroport en débranle, vieille carcasse d’avion dans le champ juste à cote de la piste où nous venions de nous poser (je ne veux pas savoir ce qui est arrivé à cette avion), bagages manquants de deux des mes compagnons de voyage : Bienvenidos a Iquitos. Dès notre arrivée, on est harcelé par des gens qui veulent porter nos bagages, qui veulent nous mener en ville à bord de leurs « motocarros » (motos taxi) ou qui veulent simplement nous vendre une excursion dans la jungle. On choisit finalement trois taxis qui nous amènent, zigzagant dangereusement entre motos et motocarros, vers la ville.

Quelle ville ! Une ville poussiéreuse, bruyante, polluée. Moi qui ai l’habitude de me repérer dans une ville en un clin d’œil, je suis tout à fait perdu. Toutes les rues, toutes les maisons, toutes les boutiques me semblent identiques. Aucune pancarte pour annoncer les noms de rue. Il faut savoir, c’est tout. ¿Puede usted decirme donde está la calle Manco Capac? (Pouvez-vous me dire où se trouve la rue Manco Capac) Por aca! Por alla! Personne ne le sait au fond…

On se trouve un hébergement pour nos premières nuits, avant d’aménager dans nos familles d’accueil respectives. Aussitôt installé, je sors pour explorer la ville. Je me promène dans les rues et moi, Daniel, celui qui a toujours réussi à passer inaperçu ou qu’il aille, j étais devenu le centre d’attraction, le blanc, le gringo, le riche…le seul barbu de la ville par surcroit. Les jeunes filles me sifflent en riant entre elles, les jeunes garçons me lancent des « Hello ! How are you ? Good Bye ! », soit les trois seules expressions anglaises qu’ils connaissent. Les personnes plus âgées me regardent d’un air suspect comme s’ils se demandaient comment j’avais fait pour me perdre jusqu’ici. « Que suis-je donc venu faire ici(tte) ? » me dis-je alors. Dans ces occasions, on cherche à deviner ce que tous ces gens pensent vraiment de nous. Et ainsi s’enclenche le processus de paranoïa. Comment les gens me perçoivent, comme l’archétype du blanc colonisateur ou comme le chanceux nord-américain ?

Chaque personne réagit différemment, mais dans mon cas, c’est comme cela que j’ai vécu le choc culturel de ma première semaine a Iquitos. Le choc étant passé, on se réveille. On est toujours aussi blanc, aussi gringo, aussi riche (par rapport aux habitants d’Iquitos j’entends), mais on cesse de s’inquiéter. À la suite de ma rencontre avec ma famille d’accueil et de mes rencontres avec des étudiants de l’Alliance française où j’enseigne pendant mon séjour ici, j’ai appris à apprécier cette ville. J’ai appris a m’imprégner des valeurs des gens qui m’entourent. Tout en demeurant très Québécois dans ma façon de raisonner, j’en viens à comprendre les préoccupations de la population d’ici, tellement différentes de celles du Québec.

Tant et aussi longtemps qu’il ne s’enferme pas dans des carcans idéologiques, l’être humain a une capacité d’adaptation hors du commun. Vivre un choc culturel, c’est justement s’adapter. C’est voir que sur le terrain (et non seulement dans les théories sociologiques), des gens vivent et pensent complètement différemment de nous. C est voir qu’on peut, à notre tour, se retrouver dans le statut de minoritaire par sa couleur de peau, par ses idées, par sa vision du monde. Au fond, vivre un choc culturel, c’est passer outre les profondes différences qu’il peut y avoir entre deux cultures et prendre finalement conscience des traits communs qui unissent tous les êtres humains.



Publié au Nouvelliste le 9 juillet 2007

http://www.cyberpresse.ca/article/20070709/CPNOUVELLISTE/70709093/5052/CPNOUVELLISTE