Le 9 octobre dernier, le comité Nobel annonçait le lauréat de son prix de la paix 2009. Il était décerné au président des États-Unis Barack Obama. Un peu moins d’un an après son élection, Obama se voyait décoré d’un des titres les plus prestigieux au monde. Pour quelles actions? Encore aucune. Obama reconnaissait lui-même que ce prix symbolisait plutôt «un appel à l’action».
Le comité Nobel a justifié le choix d’Obama par le retour à une diplomatie multilatérale ainsi que par ses efforts pour un monde sans armes nucléaires. Si le simple fait de rompre avec l’attitude conservatrice de l’administration Bush mérite un Nobel, cela en dit long sur la politique étrangère des 8 années de règne républicain (2001-2009).
Effectivement, de nombreux indices dénotent un réchauffement des relations internationales par rapport à ce qu’elles étaient. Il n’y a qu’à penser au discours au monde arabe qu’Obama prononçait au Caire en juin dernier. Le climat est plus propice à la diplomatie. Soit. Cependant, depuis le début du mandat d’Obama en janvier 2009, des dossiers tardent à se régler. Le 18 novembre, sur les ondes de la NBC, le président reconnaissait que la prison de Guantanamo ne pourrait être fermée, tel que prévu, pour janvier 2010. Rappelons qu’il s’agissait pourtant d’un dossier-clé de sa campagne présidentielle en 2008. Quant à la question épineuse des changements climatiques, il faudrait des miracles pour que le sommet de Copenhague prévu en décembre propose des avancées significatives par rapport aux objectifs de Kyoto. Évidemment, les États-Unis ne sont pas responsables du manque de volonté de certains États voyous (dont le Canada), mais, par le poids immense dont ils disposent sur l’échiquier international, ils possèdent un devoir de persuasion.
Qu’en est-il des intentions militaires de ce nouveau Nobel de la paix? Il faut se réjouir de l’annonce du retrait des troupes d’Irak d’ici la fin 2011 (décision entérinée le 15 novembre par le gouvernement irakien). Toutefois, cette décision cache une intention d’intervenir plus massivement en Afghanistan. Obama déclarait récemment la nécessité de déployer des militaires supplémentaires (30,000) en sol afghan «to finish the job». Avant de «terminer le travail», ne faudrait-il pas d’abord définir clairement les objectifs de cette mission qui s’enlise dans un véritable bourbier? Le chaos des élections afghanes d’août dernier montre clairement un pays en proie à la désorganisation et à la corruption. La situation est-elle pire qu’avant l’amorce de l’occupation du pays en 2001? Difficile à dire, mais elle n’est sans doute pas meilleure, ni d’un point de vue de la sécurité, ni sur le plan de la condition des femmes.
En choisissant son récipiendaire du Nobel de la paix 2009, le comité Nobel a posé un geste politique. Les incidences symboliques allant de pair avec ce prix sont immenses. Barack Obama doit dorénavant concilier ses rôles antinomiques de commandant en chef des armées de son pays et de prix Nobel de la paix. Non seulement des responsabilités immenses lui sont incombées à un moment charnière de l’Histoire humaine, mais le vent d’espoir (Hope) qui l’a propulsé au pouvoir a fait de lui ce surhomme ou ce super-héros que l’Histoire ne manquera pas de juger sévèrement. Il lui est alors impératif de rompre avec cette tradition belliqueuse que ses prédécesseurs lui ont léguée. Toute sa crédibilité en dépend.