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Professeur de sociologie et d'histoire.

mercredi 3 mars 2010

La torture, un acte devenu banal

Le Canada est l’un des 146 pays du monde à avoir ratifié la Convention contre la torture adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies en 1984. Selon celle-ci, la torture se définit par «tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne». D’aucuns diraient qu’il s’agit d’une pratique barbare (par opposition à «civilisée»). Une pratique d’une autre époque quoi!

Pourtant, la torture est loin d’être disparue. Bien qu’elle soit proscrite dans une majorité de pays du monde, elle représente toujours un fléau important pour la condition humaine et elle marque indélébilement les populations qui en sont touchées. Il n’y a qu’à penser aux stigmates laissés par les tortures sous Pinochet au Chili. Non seulement la torture n’est pas disparue, mais la situation se détériore sans cesse depuis le début du siècle. C’est la conclusion que tirent des Organisations non gouvernementales (ONG) comme Human Rights Watch ou Amnistie Internationale. D’ailleurs, en 2004, ces dernières constataient que la «guerre au terrorisme» menait le gouvernement étasunien à ne respecter ni la Convention contre la torture ni la Convention de Genève afin de ne pas se «laisser affaiblir» par son respect des droits humains.

Le Canada n’est pas exempt de cette dérive tortionnaire. Depuis la promulgation de la loi antiterroriste (décembre 2001), il cautionne une torture délocalisée, soit littéralement une sous-traitance de la torture. Il a alors commencé à jouer un rôle de complice dans de nombreuses allégations de tortures à travers le monde (notamment les cas de Maher Arar et d’Adil Charkaoui). À l’automne 2009, on apprenait que le gouvernement canadien était au fait (au moins depuis 2006) des mauvais traitements infligés aux prisonniers qu’il transférait dans des prisons afghanes. Ajoutons à cela le cas d’Omar Khadr, ce jeune prisonnier canadien, détenu à la prison de Guantanamo Bay depuis 2002 et dont le gouvernement Harper refuse le rapatriement.

La torture, cet acte de violence des plus répréhensibles, a été complètement banalisé par le gouvernement canadien en l’espace d’une décennie seulement. Au nom de quoi? De la sécurité. De la lutte au terrorisme. De la guerre. Par cette rhétorique simpliste et irrationnelle, on assiste à un glissement de la morale des plus inquiétants. La banalisation de la torture ouvre ainsi la voie à des reculs sans précédent en matière de droits humains.

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